Cameline

Cameline, en première ligne des projets innovants de Saipol

Article rédigé le 23 février 2021

Saipol mène depuis 2018 un projet pilote sur cette plante originaire d’Europe du nordEn 2021, il entre dans la phase de validation de la pérennité d’une telle filière. 

Avec la cameline, les agriculteurs ne remplacent pas une culture, il en ajoute une, et la commercialise ! Grâce à son cycle végétatif très court, cette crucifère se positionne en interculture d’été. Elle stocke le carbone, restructure le sol, piège les nitratesfournit du pollen en plein été aux butineuses, et surtout, elle produit une graine destinée à la fabrication de nouveaux biocarburants

La cameline, cousine du lin, pourrait bien être l’une des pistes prometteuses pour accompagner la transition énergétique du secteur du transport. À horizon 2030, le taux d’incorporation des énergies renouvelables, toutes origines confondues, devra atteindre 14 % en Europe, dont un minimum de 3,5 % avec les biocarburants avancés, c’est-à-dire ceux mobilisant une biomasse non-alimentaire. La France a d’ores déjà décidé de rehausser le taux d’incorporation de cette nouvelle ressource énergétique à 2,5 % en 2025, contre 1 % en Europe. Il devra atteindre 5 % en 2030. Tout l’enjeu est de trouver les volumes pour satisfaire les filières énergétiques. Parmi les cultures potentiellement éligibles à la fabrication d’un biocarburant à très forte réduction de gaz à effet de serre : la cameline.

Cameline Saipol

La cameline, candidate aux projets innovants

Riche en huile et en protéines, caractérisée par un cycle de développement court, sur trois mois, la cameline est la candidate idéale aux projets innovants que Saipol lance depuis trois ans afin d’étoffer son offre en énergie et, en complément, celle pour l’alimentation animale. « Notre souhait est de créer une filière de biocarburant dont la matière première est issue de l’interculture d’été après des récoltes précoce de cultures d’hiver comme le pois protéagineux, le pois de conserve, l’orge d’hiver et le blé, explique Guillaume de La Forest, responsable du projet cameline chez Saipol. Cette crucifère, qui se sème de la mi-juin à mi-juillet et se récolte au plus tard mi-octobre, entre dans ce cadre. Elle complètera l’offre en huile énergétique de Saipol issue principalement du colza. L’enjeu est double. En mobilisant l’espace de temps entre les cultures alimentaires, les agriculteurs pourront percevoir un revenu. Pour l’industriel, c’est une source d’approvisionnement local supplémentaire pour servir de nouveaux contrats

Vers une filière cameline, structurée et rémunératrice

La possibilité de mobiliser des hectares sur le territoire français doit être validée avec chaque opérateur. Saipol évalue la qualité des huiles obtenues dans les biocarburants destinés à l’aéronautique ainsi que celle des tourteaux issus des graines décortiquées. De potentiels acheteurs de ces secteurs suivent avec intérêt le projet. « Nous sommes en train de poser le cadre, les volumes n’auront plus qu’à entrer dans ce périmètre », complète Guillaume de La Forest. Le projet a été lancé en 2018 afin de valider l’insertion de la culture dans la rotation. L’étape suivante est celle de la viabilité de la filière. En balance dans ce « crash test filière » : les atouts et difficultés rencontrés par les agriculteurs et les organismes stockeurs. Un groupe pilote a été créé en 2020. La cameline a été semée sur plus de 1 000 ha en partenariat avec huit organismes stockeurs, les Chambres d’agriculture, le semencier Camelina Company, l’institut technique Terres-Inovia, l’expérimentation devra monter en puissance tant sur les surfaces que sur les rendements par l’optimisation des itinéraires techniques. « Nous avançons pas à pas sur la connaissance agronomique, complète Guillaume de La Forest. En 2022, nous fixerons un cahier des charges qui s’inspirera de ces dernières années d’expérimentations. Nous nous engageons d’ores et déjà à acheter les lots à un prix proche du colza. » Afin d’être prêts à décoller !

Des atouts agroécologiques

 L’Indice de fréquence de traitement de la cameline, Camila sativa, est de zéro : 

  • Résistante aux maladies, la cameline ne demande pas non plus de passage d’insecticide. 
  • Les altises aiment la moutarde et le colza mais fuient la cameline
  • Comme elle lève vite, elle étouffe les adventices. 

Les rendements se situent autour de 10 q/ha mais les charges en intrants sont assez basses  

  • 50 euros/ha liés au semis 
  • 40 unités d’azote/ha à apporter derrière une orge par exemple 
  • Si le précédent est un pois, les reliquats d’azote évitent la fertilisation 

Bien implantée, la cameline passera sans dommage les chaleurs estivales 

Riche en nectar et pollen, elle apporte de la nourriture aux abeilles à une période où l’offre en fleurs décline  

Son système racinaire pivotant est restructurant pour le sol et elle piège les nitrates. 

Guillaume de La Forest

« Les seules charges pour implanter de la cameline seront liées à l’achat de la semence, la fertilisation si nécessaire et aux coûts d’implantations lors du semis. »

Guillaume de la Forest, Responsable du projet Cameline

Les derniers réglages se retrouvent surtout au semis

Guillaume De La Forest - champ de cameline

Quels sont les premiers enseignements sur la culture de cameline ? Les essais ont démontré que l’on pouvait viser un rendement moyen de 10 q/ha mais dans des bonnes conditions des parcelles sont montées jusqu’à 17 q/ha.  Ces rendements peuvent paraître faibles mais sont à rapprocher des coûts de production très bas et proches d’un couvert végétal. Les deux principaux postes de charges concernent le semis et, la fertilisation si la cameline suit une céréaleLes plus beaux scores sont notés lorsque la cameline est semée mi-juin sur des sols conduits en semis direct. La technique du semis constitue le principal point d’amélioration. « Cette culture démarre très vite dans de bonnes conditions hydriques, explique Guillaume de la Forest, responsable du projet cameline chez Saipol. Les agriculteurs qui ont l’habitude de semer des couverts, de façon très réactive après les moissons, sans travail du sol, avec une fertilisation localisée si nécessaire partent avec une longueur d’avance. Car tout l’enjeu est de soustraire la période de la levée au risque de sécheresse estivale et d’arriver à maturité avant le semis de la culture d’hiver. » 

En 2021, place à l’innovation : « Nous allons expérimenter le semis derrière une Cive* et aussi le semis effectué à la volée dans la culture précédente, trois semaines avant sa récolte, et à l’aide d’un drone »poursuit Guillaume de la Forest. Autre essai  : le semis en association avec du trèfle, sans herbicide, afin d’être éligible au paiement SIE** de la Pac. « Notre objectif  est d’élargir le potentiel de surface à semer en France.» 

*Cive : Culture intermédiaire à vocation énergétique
**SIE : Surfaces d’intérêt écologique (PAC)